Eygalieres galerie de portraits

Valentin Marcellin

L'engagement et l'équilibre

A l’approche de ses 24 ans, Valentin Marcellin, le plus jeune membre du Conseil municipal d’Eygalières, donne une impression de solidité et de maturité. « Droit dans ses espadrilles », bien au clair dans sa tête sur ses priorités personnelles, engagé, concentré et sérieux, il a déjà derrière lui un parcours qui témoigne de sa capacité à entraîner les autres et de de son goût pour les initiatives novatrices. Il concilie ainsi avec bonheur un profond enracinement dans les Alpilles, où sa famille est présente depuis des générations, un goût pour la relation avec les autres et le désir de les aider. Un temps vice-président puis président de l’association des jeunes du village, « Li Cagonis », créée par la génération de ses parents, aujourd’hui Conseiller municipal et par ailleurs « éducateur de rue » à Tarascon, Valentin a placé l’engagement au cœur de sa vie.

Ainsi, lorsque, il y a un peu plus de deux ans, Aline Pélissier (voir son portrait dans cette Galerie), qui constituait sa liste pour les élections municipales, lui a proposé de la rejoindre, Valentin n’a pas hésité une seconde avant d’accepter cette sollicitation. Son amour du village, dit-il, était trop puissant pour qu’il puisse se dérober. Et puis, avec un grand-père maternel, Jean-Paul Dureau, de longue date adjoint au maire du village voisin de Mollégès, la gestion municipale ne lui était pas totalement étrangère.

S’engager, s’investir au service des autres semble être comme un besoin pour lui, un besoin à la fois viscéral et réfléchi. Plusieurs ingrédients se sont combinés pour produire cette alchimie personnelle. Bien entendu, c’est d’abord son enracinement local, ce sentiment d’appartenir au terroir où il est né, qui va d’Eygalières du côté paternel à Mollégès du côté maternel, et de devoir quelque chose à ce terroir qui le remplit de bonheur, voire peut-être de fierté. Ce terroir, Valentin a, très jeune, pris l’habitude de parcourir à cheval, grâce à son grand-père paternel, René Marcellin, propriétaire d’une promenade à cheval au Mas des Mauniers. Et pendant des années, ce grand-père a accueilli chez lui des adultes en situation de handicap ; Valentin, qui avait alors entre 8 et 12 ans, a acquis au cours de ces mois d’août une sensibilité particulière à la relation aux autres, sensibilité à laquelle sa mère a contribué elle aussi à sa manière : aujourd’hui professeur d’économie sociale et familiale au Lycée professionnel de Salon-de-Provence, elle a été notamment assistante sociale. De son côté, le père de Valentin est lui aussi bien enraciné dans le terroir puisqu’il est chef d’équipe au Domaine viticole de la Vallongue. Enfin, un événement personnel majeur a fortement contribué à la maturité précoce de Valentin : à 15 ans, il a fait une grave chute de cheval, qui lui a causé une hémorragie interne et, se voyant mourir, l’a fait mûrir de plusieurs années en quelques jours.

Cependant, chute de cheval ou pas, il s’était préparé à suivre les traces de son grand-père, entrant en apprentissage dès 15 ans pour apprendre la gestion d’un centre équestre. Mais il a finalement pris conscience qu’en vivre serait bien difficile et s’est donc réorienté. A 19 ans, il s’inscrit à l’Institut méditerranéen de formation à Avignon pour devenir, par la voie de l’apprentissage, « éducateur spécialisé », diplôme de licence qu’il a obtenu il y a deux ans. Cet apprentissage, il le fait à Châteaurenard avec l’association Groupe ADDAP 13, fondée en 1987, qui se fixe pour objectif d’agir dans la rue en éducation auprès de publics en difficulté. La licence obtenue, Valentin reste à Châteaurenard pour travailler pendant un an au bénéfice de mineurs non accompagnés. Il enchaîne pendant plusieurs mois avec des jeunes présentant des troubles du comportement et des déficiences intellectuelles, puis en accompagnement d’adultes qui font face à des difficultés financières.

Et depuis le 1er juin de cette année, il est « éducateur de rue » à Tarascon pour le compte à nouveau de l’association Groupe ADDAP 13. Reconnaissons qu’il n’a pas choisi la manière la plus facile d’exercer son métier. En effet, l’éducateur en prévention spécialisée intervient sur un territoire précis sous le principe de la libre adhésion. Il a pour mission d’accompagner ces jeunes, âgés entre 11 et 25 ans, dans différents domaines : démarches administratives, économiques, scolaires, insertion professionnelle. Son rôle est d’être au contact des jeunes en difficulté, dans la rue, pour devenir « un repère », comme le dit Valentin, une personne à laquelle on sait pouvoir recourir en confiance lorsque surgit un besoin spécifique. L’éducateur peut mener d’autres actions, avec des institutions ou organismes complémentaires, comme mettre en place des chantiers éducatifs temporaires pour sensibiliser ces jeunes à la notion du travail, alors que leur environnement est marqué par un chômage massif : Tarascon est la ville de Provence-Alpes-Côte-d’Azur où le taux de pauvreté est le plus élevé. Pour parvenir, avec son alter ego féminin, à s’insérer, à se faire reconnaître et accepter, là où la défiance est habituelle, un long travail d’acclimatation est nécessaire. Valentin en est au début, mais il est convaincu d’y parvenir. Ses qualités et son engagement y contribueront certainement.

A Eygalières, il n’a jamais eu besoin d’acclimatation. Il est ici dans son milieu naturel et c’est tout naturellement qu’à 19 ans, parallèlement à sa formation, il s’engage dans l’association « Li Cagonis », l’association des jeunes du village, suivant les traces de ses parents et de leurs camarades de génération. Cependant, avec quelques autres, Valentin a la volonté d’ouvrir les actions de l’association tout en préservant les traditions taurines ou les soirées animées. Elu vice-président, puis président, il est au premier rang pour lui insuffler un nouveau dynamisme et l’orienter un peu plus vers les autres. Ainsi, Li Cagonis prend en charge et relance le Téléthon annuel, qui s’était assoupi. Elle crée également des animations pour les enfants le week-end.

Trois ans plus tard, Valentin est élu au Conseil municipal et quitte l’association. Il participe aux travaux de plusieurs commissions : école/éducation, action sociale, logements, jeunesse/sports/associations. Mais surtout, il est le porteur du projet d’Assemblée des jeunes d’Eygalières. A vrai dire, l’idée initiale était d’instaurer un « conseil municipal des jeunes », mais les contraintes sanitaires de l’époque ont conduit les élus à choisir une version plus modeste, et cependant novatrice, avec le triple objectif d’associer les jeunes aux projets de la Municipalité, de développer leur conscience citoyenne, et d’initier un dialogue entre générations. L’appel à candidatures lancé il y a quelques dix-huit mois a certes obtenu un écho plus faible qu’espéré. Mais l’Assemblée a pu être créée, elle fonctionne avec ses douze membres et a participé à plusieurs projets, écologiques ou humanitaires : collecte de bouchons en plastique pour la production de fauteuils roulants, fourniture de vêtements à des réfugiés ukrainiens, implication des jeunes dans le Téléthon, participation à la Journée de l’environnement. Ce n’est qu’un début.

Au-delà de ces sujets, Valentin est aussi un citoyen et un édile conscient des enjeux plus globaux pour son village, notamment celui de l’identité d’Eygalières aujourd’hui et demain dans le contexte d’inflation des prix du foncier, avec ses conséquences en chaîne. Bien entendu, il est tout aussi conscient de la faiblesse des moyens disponibles pour y remédier ou les compenser. Mais pour lui l’objectif majeur est de préserver l’identité collective du village et de soutenir les Eygaliérois.

A lire tout cela, on peut se demander s’il garde du temps pour avoir une vie personnelle. Il n’en parle pas mais affirme que c’est le cas et qu’il ne se « néglige pas ». Et au fond, c’est bien la volonté d’équilibre qui semble caractériser Valentin Marcellin : équilibre entre ses différents engagements, équilibre entre ses engagements et sa vie privée, équilibre entre sérieux et enthousiasme. Equilibre dans sa manière de s’exprimer, posée et réfléchie. Et équilibre qu’il appellerait de ses vœux entre les locaux et les gens qui viennent de l’extérieur, afin de préserver l’identité d’Eygalières, son village.

13 juin 2022